Le trio suédois n’avait pas encore trouvé son style lorsqu’il a décidé de faire un hommage à la musique de la légende du jazz, Thelonious Monk, mais il tenait à le faire, à sa façon. Ainsi, Esbjörn Svensson et ses amis ont repris une dizaine de chansons que Monk a composées et qui sont, pour la plupart, demeurées de véritables standards du jazz. Svensson a de la pression pour être à la hauteur du jeu de piano de Monk, mais il a bien réussi à apporter sa touche. La question : cet album hommage à Monk parvient-il à le rendre plus accessible au public?
Le style en général est plutôt conventionnel. E.S.T. n’est pas encore sorti des sentiers battus musicalement. Le piano s’occupe de la mélodie, ce qu’il fait très bien à chaque pièce, puis se lance dans des solos généralement de quelques minutes, où il se laisse aller à son art. Technique impressionnante pour les amateurs du styles, son peu agréable à écouter pour d’autres. C’est là tout le dilemme du jazz, rien de nouveau. Reste que la version «épurée» des compositions de Monk (on s’en tient à un trio, alors que les versions originales étaient souvent jouées en plus grand ensemble) est très solide et réfléchie. Dans certains cas, la version E.S.T. est de loin meilleure à celle de Monk. Mais il se peut que les puristes préfèrent ce que le compositeur original a fait.
Le groupe suédois avait déjà quelques enregistrement derrière lui, mais c’était tout de même risqué de sortir un album exclusivement de vieux standards de jazz d’un compositeur décédé au début des années 1980, surtout s’il s’est donné pour mission de rendre le style plus accessible à toutes les oreilles, ce qu’il fera par la suite. On peut donc voir Plays Monk comme un cadeau qu’Esbjörn Svensson se fait à lui-même, et qu’il s’amuse à rendre hommage au maître du blues mineur. Si on sent l’effort constant de redonner un second souffle à ces pièces, il manque encore une petite magie qui fait que le groupe réussit à se démarquer de tous les autres qui ont déjà repris ces standards des dizaines de fois.
À écouter : I Mean You, Bemsha Swing, In Walked Bud
5,7/10
Par Olivier Dénommée