Tuesday Wonderland est le 9e album studio du groupe jazz E.S.T., qui ne cesse de pousser son style un peu plus loin à chaque enregistrement. Cet album, faisant suite à Viaticum, nous donne droit à des compositions très fortes comme la pièce titre ainsi que d’autres, rappelant le style de Pat Metheny, avec Dolores In a Shoestand. Une bonne part des pistes durent environ 4 à 5 minutes, ce qui est relativement court compte tenu des solos et des breaks que contient pratiquement chaque piste.
La première pièce de l’album, Fading Maid Preludium, offre une intro très électronique à cet album où le contrebassiste Dan Berglund fait un travail impressionnant. Par contre, ce prélude très spécial est immédiatement remplacé par la pièce Tuesday Wonderland qui revient dans les «pantoufles» du trio. Le morceau est rythmé et mélodique à la fois; on traverse plusieurs ambiances, et, bien sûr, on a droit à quelques solos très bien sentis sans être trop techniques pour être désagréables à l’oreille. Sans contredit une des compositions fortes de cet album.
Suit ensuite The Goldhearted Miner, qui tombe dans la ballade. Presque plus pop que jazz, la mélodie du pianiste suédois est plus que jamais mise de l’avant, offrant virtuosité et sensibilité à la fois. Puis, contraste total, Brewery of Beggars nous explose à la figure, avec sa musique archi-chargée. Le piano n’arrête pas une seconde, la batterie abuse de toutes les cymbales disponibles et la contrebasse contribue à ce brouhaha ambiant. Évidemment moins mélodique que les compositions précédentes, certaines sections de cette pièce de 8 minutes réussissent à l’être un peu.
Les énergies varient donc beaucoup d’une chanson à l’autre, offrant une belle variété à travers tout l’album. Arrivé à Eightundred Streets By Feet, on retrouve une autre composition du calibre de Tuesday Wonderland au niveau de la variété. Puis il y a Goldwrap, dans laquelle les percussions ne semblent jamais arrêter, à en devenir légèrement répétitif. Le piano non plus n’arrête guère, mais il ne cesse pourtant jamais d’être mélodique alors ça passe très bien. La pièce est parmi les plus courtes, mais elle est d’une efficacité indéniable. Esbjörn Svensson nous rappelle à chaque fois qu’il est possible de faire beaucoup de notes en peu de temps et qu’aucune d’entre elle ne soit jamais de trop.
Enfin, on revient encore à un slow, encore plus émotif et efficace que The Goldhearted Miner. Il s’agit cette fois de Slipping on the Solid Ground. On peut presque dire que c’est la dernière pièce de l’album, puisque la suivante est Fading Maid Postludium, vraisemblablement la suite de la piste d’introduction. Elle commence d’ailleurs avec un fade-in, finissant l’album à peu près de la même façon qu’il a commencé… si ce n’est de la toune cachée en plus! Une autre pièce assez ambiante, qui semble venir d’une autre dimension.
Bref, dans l’album en général, E.S.T. a bien compris comment rendre son jazz accessible et c’est tout à son honneur. Même les pièces qui le sont moins semblent relativement mieux passer dans cet ensemble généralement très agréable à écouter même pour des oreilles non averties. Le groupe s’est tout de même amusé avec les compositions au début et à la fin de l’album, mais celles-ci peuvent rebuter ceux qui n’étaient pas sûr de vouloir écouter l’album en premier lieu. Une fois ces «obstacles» passés, Tuesday Wonderland se déguste très bien.
À écouter : Tuesday Wonderland, Eightundred Streets By Feet, Slipping on the Solid Ground
8/10
Par Olivier Dénommée
(Modifié le 31 janvier 2014)