E.S.T. a frappe fort avec son huitième album, qui a réussi à attirer l’attention autant des amateurs de jazz mais aussi du grand public. Avec raison, Seven Days of Falling voyage entre diverses énergies. Esbjörn Svensson et ses comparses savent parfaitement ce qu’ils font et sont en contrôle dans cet album plus qu’accessible.
On commence en douceur avec Ballad For the Unborn. La mélodie prend près de 4 minutes pour pleinement s’installer, mais une fois qu’elle est là, on se demande pourquoi la pièce est déjà finie. Ce build-up n’est que le premier de l’album. La pièce-titre Seven Days of Falling prend ensuite le relai, avec une ambiance légèrement plus lounge, mais avec une montée de tension de la part du contrebassiste Dan Berglund qui joue allègrement dans le registre aigu. On a droit à ce genre de build-up pas moins de 2 fois dans cette même pièce. Très efficace; avis aux frissons.
Comme c’est l’habitude du groupe, il fallait s’attendre à des pièces où les musiciens s’amusent un peu. Ils le font sur Mingle In the Mincing-Machine, sans trop sacrifier le sens de la mélodie. Reste que les frissons des premières pièces sont partis. Le trio offre ensuite une sorte d’interlude, intitulée Evening In Atlantis. On a à peine le temps de se plonger dans cet univers qu’on passe à la piste suivante. On en aurait voulu beaucoup plus. Une ambiance similaire revient peu après, avec Believe Beleft Below, une ballade très douce, très chantante. Un peu mélancolique, mais langoureuse à la fois.
Difficile de mettre des mots pour décrire la pièce suivante, Elevation of Love. Terriblement groovy, mais discrète, elle ne sonne pas comme une «toune d’amour», mais il y a tout de même des sentiments qui sont dégagés, surtout lors de l’énorme montée dramatique aux trois quarts de la pièce environ. Dur d’offrir une composition aussi forte ensuite, et effectivement, on descend dans l’intensité avec In My Garage, avec une ambiance plus bon enfant.
Une ballade plus mélancolique s’ensuit. Le titre Why She Couldn’t Come? est assez évocateur, après tout. Mais le clou est vraiment la dernière pièce, O.D.R.I.P., où on mélange la noirceur d’un requiem, l’intensité du rock et l’audace du jazz. L’album se termine presque sur cette note sombre mais forte. En effet, une pièce cachée nous attend après quelques minutes de silence. Et l’air ne nous est pas inconnu, puisqu’il s’agit d’une version avec paroles de Believe Beleft Below. Il n’est pas habituel d’entendre des paroles dans les compositions d’Esbjörn Svensson, mais le style Sinatra du chanteur n’est pas mal. La chanson originale vous paraîtra soudainement encore plus chantante.
La seule vraie faiblesse de cet excellent opus est qu’il crée des émotions très vives et que le groupe choisit de ne pas entretenir ces émotions. Cela fait un album en montagne russe, comme il y en a beaucoup. Une simple redisposition des pièces changerait probablement la donne et une écoute aléatoire peut créer un parcours émotif fort différent d’une écoute à l’autre. Et puis ça donne un prétexte pour écouter l’album plusieurs fois.
À écouter : Seven Days of Falling, Elevation of Love, O.D.R.I.P.
8,5/10
Par Olivier Dénommée