La saxophoniste et chef d’orchestre Christine Jensen a eu la chance de gagner un Juno en 2011 pour son album Treelines. Avec raison : son style riche mettant donnant autant de place à la mélodie et à la virtuosité est particulièrement efficace. Voici ce qui retient l’attention dans cet album.
Tout d’abord, notons qu’une femme qui dirige un gros orchestre est encore plutôt rare sur la scène montréalaise, où elle est installée depuis plusieurs années. L’approche est subtilement différente, mais rentre au poste tout autant. Aussi, on a droit ici à un album assez long (74 minutes), même si l’œuvre ne contient que 8 pistes. Le développement des mélodies et, bien sûr, les solos, occupent une place assez importante dans le travail du Christine Jensen Jazz Orchestra.
L’intro de Dancing Sunlight, au début de l’opus, est lent, émotif, mais très solennel. Puis on tombe dans un registre très smooth jazz. Cela ne prend pas moins de 3 minutes avant qu’on réalise qu’on a véritablement affaire à un big band. Mais le build-up s’est fait lentement mais sûrement et on ne fait pas le saut lorsque tout le monde fait les accents en même temps. Les solos viennent juste après. Solidement interprétés, soit dit en passant.
Une autre compo intéressante à écouter grâce à sa douceur et son émotivité est Western Yew. Pendent près de 11 minute, cette pièce réussit à rester douce et émotive, et ce, malgré un solide qui crée plus d’action. On a aussi évité les longueurs, pourtant difficiles à éviter après plusieurs minutes.
Seule composition ne venant pas de Christine Jensen elle-même, Dropoff a été écrite par nul autre que son mari, Joel Miller, aussi saxophoniste, et membre de son orchestre. Par rapport aux œuvres précédentes entendue sur l’opus, celle-ci fait beaucoup plus usage du plein potentiel du big band, tout en restant très mélodique. Autre compo à surveiller : Dark and Stormy Blues est très doux pendant les deux tiers. Puis surprise, l’énergie embarque de façon assez intense. Sans parler des solos! Ne montez pas trop le son. Seafever qui suit se démarque des autres pièces grâce à son énergie plus space que les autres morceaux de Treelines. Ce n’est pas méchant du tout à écouter.
La dernière pièce, Vernal Suite, se situe dans un registre plus tendu, plus agité. Cela change du reste de l’album qui est plus doux. La pièce a tout de même des moments plus tranquilles aussi! Et à fin pourra vous rappeler le début de la première musique de l’album. On boucle ainsi la boucle, de façon solennelle.
Contrairement à beaucoup d’autres big bands, celui de Christine Jensen reste «sage» : de longs passages dans la plupart des pièces n’étaient joués que par quelques musiciens, comme si c’était une formation trio ou quatuor. Et même quand tout le monde joue, c’est fait de façon modérée. Rien n’explose, rien ne vous agressera les oreilles. C’est une qualité pour certains, un défaut pour d’autres; cela dépend de votre position sur la question, mais dans les faits, cela montre un grand ensemble plein de talent et de virtuosité, qui sait se retenir pour laisser au premier plan ce qui compte vraiment : une belle mélodie qui reste en tête ou un soliste qui lui, se laisse aller. Bravo pour ce travail de tous les musiciens qui ont participé au projet Treelines.
À écouter : Treelines, Western Yew, Dropoff
7,9/10
Par Olivier Dénommée