Nous vous prévenons tout de suite : l’album 2012 de Someurland, projet solo de la chanteuse Élaine Martin, est très consistant et nécessitera probablement plusieurs bonnes écoutes pour l’apprivoiser. Ce n’est pas tant musicalement que c’est difficile d’approche – on a droit à une musique électro-indie solide – mais bien dans la voix, qui est d’une grande ambiguïté.
En effet, à l’écoute, on jurerait que tout n’est pas chanté par Élaine Martin, tellement les voix semblent masculines par moment. Mais une fois que cette information est digérée, on peut s’intéresser au cœur du sujet : la qualité de l’album.
Au vol démarre l’album en douceur, introduisant les claviers avant de laisser venir les voix, puis des cordes. Lorsqu’on est prêt, les percussions arrivent avec les basses. Puis, après deux minutes de préparation mentale, on arrive au hook de la chanson, chargé et lourd, mais efficace de par sa mélodie.
On se dirige ensuite vers le minimalisme électronique avec La mine. Du moins, minimaliste jusqu’au milieu, car après, les guitares et les synthés prennent beaucoup plus d’espace. Quelques autres titres de l’opus (Indigène, Golden Bridge) reprennent une méthode similaire. Notamment Portland retiendra l’attention pour son début lent et smooth. On se sent dans une petite ballade toute douce, jusqu’à ce que la guitare vienne tout changer, apportant plus de puissance, de tension et de distorsion à l’ensemble, et tout ça sans sacrifier la mélodie.
Une chanson fait tout de suite penser au style de Misteur Valaire : Juste un peu trop. La sympathique musicalité des synthés y est probablement pour beaucoup, même si cela dégénère vers la fin. Chapeau au puissant refrain de La plus vieille histoire du monde.
Dans Excentriques égoïstes, on a droit à deux voix très distinctes. La première, une voix résolument féminine, un peu aérienne, qui apporte une certaine légèreté à la chanson pourtant relativement lourde dans sa musique. Élaine Martin passe ensuite à sa voix grave en seconde portion de la chanson, avec un rythme constant qui rappelle un robot (imaginez une version plus sophistiquée de Les larmes de métal de Soupir).
Fulton, avec son mélange efficace de piano et de synthé, est un titre fort apprécié et rafraîchissant à l’approche de la fin de l’opus. C’est aussi une pièce pleinement instrumentale. Épilogue, qui clotûre cet album de 45 minutes, marque aussi à sa façon : la chanteuse assume ici sa voix féminine pour la dernière chanson, le tout sur une musique tantôt envoûtante, tantôt carrément accrocheuse. Une finale en force.
L’album 2012 présente beaucoup de beaux build-up musicaux généralement assez réussis, offrant des chansons dynamiques et intéressantes à écouter. Et lorsqu’on apprivoise la voix de la chanteuse, tout s’écoute mieux aussi. Le style vocal colle assez bien sur certaines chansons au côté plus «robotique» de l’album. Par contre, mis à part quelques titres précis, les chansons n’arrivent pas facilement à se démarquer les unes des autres. Pour ce qui est de la ligne directrice, elle ne semble pas parfaitement claire dans les paroles. Celles-ci sont parfois crues (quelques shit et fuck par-ci par-là) et touchent à divers sujets, et il n’est pas évident de savoir avec certitude s’ils sont liés ou non. Il semble pourtant que les chansons de 2012 sont liées à un événement qui s’est déroulé cette année-là. C’est peut-être un élément à préciser dans un futur enregistrement, de rendre le thème plus évident.
Vous pouvez écouter l’album et le reste de la musique de Someurland sur sa page Bandcamp.
À écouter : La plus vieille histoire du monde, Fulton, Épilogue
7,4/10
Par Olivier Dénommée