Lisbonne Télégramme, poésie totale et incomplète
Miroir d’automne, le premier opus né de la collaboration entre Maritza et trois membres des Blue Seeds est sorti le 31 mars. Le quatuor s’offre ici une œuvre intelligente et sensuelle où règne une poésie totale et incomplète à la fois, en état d’équilibre instable, dans un vase à trop-plein.
On se laisse d’abord facilement aller au jeu aérien que propose l’attirail de guitares par la finesse acoustique, la lourdeur des longues notes électriques et la spatialité de la guitare à slide. Le tout se renforce du brillant son du violon, une signature Sophie Trudeau, et du claironnement des xylophones. En contrebalance viennent s’ajouter la batterie furtive et les claviers qui forment une tapisserie tantôt kitsch, tantôt franchement moderne, et la voix résonne entre ces quatre murs sans qu’on ne puisse l’entendre, l’écouter.
Quand, à l’écoute de Bientôt, on relève la tête surpris de ressentir l’influence de Paranoid Android (Radiohead), on se retrouve en passage d’une chambre feutrée en pleine post-rupture à la contemplation d’un phare en proie à l’incendie qui le ravage et nous sommes à la dérive de la berge, des côtes de Lisbonne, puis à l’océan, dans une barque.
Si on peut lui reprocher un manque de punch et une certaine retenue, l’album est couronné de sensibilité. Lisbonne Télégramme produit un savant mélange d’éléments aériens-solides se mouvant dans une fluidité, un courant, dont le groupe a su faire sienne.
Bonus du salonnier :
La déclinaison des trois humeurs de l’oeuvre à écouter dans l’ordre et le désordre se résorbent sous le son élévateur et presque country de Lisbonne sans toi, dans l’approche Radioheadesque que transmet la piste Bientôt et dans la tension statique des paroles travaillées de Je n’ose plus.
Vous pouvez entendre l’album sur la page Bandcamp du groupe.
À écouter : Je n’ose plus, Bientôt, Lisbonne sans toi
8/10
Par Ghislain St-Germain Forcier
(Modifié le 15 avril 2015)