CHRONIQUE : Loud Lary Ajust au Club Soda, 10 avril 2015

Loud Lary AjustPar Mathieu Laferrière

Ce vendredi, un groupe de rappeurs montréalais se produisait sur les planches du sympathique Club Soda. Loud Lary Ajust, respectivement les pseudonymes des membres, est apparemment connu du milieu underground du rap québécois, donnant dans la même veine que Dead Obies. On allait assister à un très bon spectacle.

C’est après de sérieuses fouilles corporelles et matérielles que nous pûmes entrer dans le sombre endroit, farfouillant çà et là où nous pourrions nous placer. Peu connaisseurs du genre, nous avons opté pour l’espèce de mezzanine du deuxième étage, bien placé pour voir la foule qui remplissait peu à peu, pendant la première partie, la totalité du plancher jusqu’au technicien du son. Il y avait, pendant la première heure, J.u.D., un DJ qui mélangeait habilement des moments plus ambiants de rap, incorporant à intervalles des breakdowns qui  rendait plusieurs personnes plus agitées, entre des parties plus trap et certaines plus dubstep. Un sympathique mix, mais il faut tout de même attendre les gars de LLA sur la scène pour que l’ambiance tourne au quasi-délire.

Curieuse observation : une bonne partie de spectateurs deviennent frénétiques lorsque surviennent des breakdowns et dansent avec plus d’entrain dès leur venue. Je m’explique : le breakdown est un changement de tempo généralement plus lent et plus insistant dans la basse, tempo sur lequel il est très facile de suivre le rythme. On les observe dans les genres de musique où les rythmes sont souvent changeants, comme certains styles de métal ou le dubstep. À ainsi les voir, c’est un peu comme si les autres mélodies étaient moins appréciables pour la masse.

En effet, introduit par une mélodie de claviers très intéressante de la pièce Rien ne va plus, parée de sons de sirènes, on sent la tension ascendante jusqu’à temps que les maîtres de cérémonie entrent sur scène. Là, on a définitivement l’impression de faire partie de la marée humaine qui, visiblement, connaissait les paroles. Provenant de la foule : quelques agitations et bousculades festives, faibles effluves de verdure,  odes chantées, le spectacle commençait bien à ressembler à ce dont j’étais jadis habitué des Club Soda et Métropolis de ce monde.

J’aimais bien le fait qu’on y incorporait un batteur ainsi qu’un guitariste, rajoutant une touche plus interactive et visuellement présente. Une chose est certaine pour moi : certaines mélodies sont assez bonnes pour qu’on y hoche la tête, même pour une première écoute. Ça groove. Karim Ouellet et Koriass ont d’ailleurs foulé chacun la scène, pour une chanson. Moi-même galvanisé par les pièces, j’ai dû demander à quelques reprises le nom de certains titres précis pour effectuer une deuxième écoute, version studio cette fois, chez moi. Hôtel Hell fait partie de celles-ci. Une Joliettaine qui avait fait le trajet pour voir son groupe favori me mentionna que la version studio était beaucoup plus appréciable puisque le son de l’endroit ne rendait pas justice aux voix et déchargeait trop de basse. Pour ma part, je suis d’avis contraire, car bien que la prestation live rende définitivement les instruments et les paroles moins faciles à déceler, j’accorde une importance primordiale à la basse et ses vibrations (ici très présentes). Peut-être ma préférence au live avec LLA serait-elle aussi tributaire de l’ambiance du moment qui n’était pas celle lors de ma deuxième écoute.

Un élément propre à certains groupes québécois est que LLA fait une écriture lyrique bilingue omniprésente et insistante, c’est-à-dire où le parolier peut dire la moitié d’une phrase en français et le reste en anglais. On y observe également la présence importante d’anglicismes. Poétiquement, les paroles sont la dernière chose sur quoi je me penche lors de l’écoute des pièces de LLA, et c’est bien comme ça puisque cet emploi répétitif de locutions anglaises me décourage un brin, le français étant selon moi d’une précision telle que les nombreux emplois à l’anglais m’apparaissent discutables. Esthétiquement, ça passe, surtout avec l’intensité des membres sur scène. Les éléments trap ont toutefois été pour moi meilleurs pour la première partie du spectacle que par LLA, mais les influences rap typiquement américaines ont quant à elles un bien bel effet sur leur musique.

L’ambiance festive de la soirée est évidemment une raison pour laquelle je considérerai ma présence si un deuxième spectacle s’offre à nous. Pour la suite des choses, laissons le temps passer, et ces créateurs nous feront probablement résonner du bon matériel lors d’autres prestations.

(Crédit photo : John Londono)

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