Sorti le 9 juin 2015
Mononc’ Serge, chanteur d’actualité? Il faut remonter à la fin des années 1990, où ses premiers albums (Mononc’ Serge chante 97 et Mononc’ Serge chante 98) étaient consacrés à ce sujet. Plus d’une quinzaine d’années plus tard, il a retenté l’exercice à travers Ce show, animé par Mike Ward, puis via Voir. Cela a amené la naissance de ce qui deviendra Mononc’ Serge 2015, où il se gâte avec ce qui se passe dans le monde, mais tout particulièrement au Québec. Et il est aussi cinglant qu’à son habitude dans ses paroles, mais avec une musique généralement plus douce.
Ceux qui ont suivi Mononc’ la dernière année auront entendu la plupart de ses nouvelles chansons, alors peu de surprises ici. Par contre, il faut reconnaître que cette compilation des compositions des derniers mois frappe très fort.
Coupe Couillard, première chanson aux accents country, nous bombarde de références : l’ancien ministre Bolduc, Luka Rocco Magnotta, les projets de pipelines, etc. Le tout passe très vite, mais marque un objectif clair : se moquer de l’austérité du gouvernement libéral. Dommage que le solo ait été coupé, il semblait bien parti! Plus loin, on revient avec L’ayatollah Couillard, où cette fois il offre une panoplie de jeux de mots qui rappellent le flot de François Pérusse. Ridicule, mais terriblement efficace. À écouter plusieurs fois si vous ne voulez rien manquer.
Notons quand même que Mononc’ Serge offre des chansons aux sujets qui s’éloignent de l’actualité pure. C’est le cas de Hostie de bonne smoke, où il fait l’apologie de la cigarette et de ses bienfaits, malgré tout ce qu’on en dit. Avec une musique douce et une mélodie anormalement posée, l’effet est vraiment très réussi.
Mais là où le premier grand coup de l’artiste à être entendu sur l’album, c’est dans Charlie Hebdo. Sujet encore sensible, pourtant tourné en dérision, alors que Mononc’ s’imagine qu’il ne peut pas lui arriver le même sort parce qu’il est considéré «un chanteur de marde que tout le monde regarde comme un crisse d’attardé». Cette dérision imagée cache quand même un message plus fort.
C’est devenu une tradition, le chanteur fait une toune parlant du PQ. Les séparatistes dresse un portrait plutôt juste de la situation. Mononc’ Serge, voyant? Pas le temps de se poser la question : on passe déjà à Fait très divers, qui fait un gros clin d’œil au cas de Joël Legendre, en collaboration avec Pépé.
Des questions et Corrompu offrent matière à réflexion, mais le reste se veut plutôt une dérision de ses cibles préférées : les politiciens et la religion (surtout musulmane, qui a été particulièrement présente dans l’actualité). Mention à l’intro sensuelle de L’ebola à Saguenay.
On garde PCP et PKP pour la fin, confirmant l’(absence d’)amour de Mononc’ envers Pierre Karl Péladeau, le comparant de façon plus ou moins avantageuse face à une drogue hallucinogène. Pour le gag, il faut dire que ça marche, bien que les «Dans’ yeule» et les «Dans l’cul» s’usent vite.
Alors que Mononc’ Serge est réputé pour son gueulage régulier dans ses chansons, il garde un ton plutôt mélodique dans Mononc’ Serge 2015, gardant cette mélodie qu’il avait proposées dans l’album acoustique Pourquoi Mononc’ Serge joues-tu du rock’n’roll après plusieurs albums à saveur beaucoup plus proche du métal. Ici, les guitares se veulent plus douces, souvent entre le rock et le country, laissant toute la place aux textes cinglants de Serge Robert.
Le seul vrai problème avec cet album, c’est sa durée de vie. Même si certaines de ses nouvelles compositions sont puissantes, il y a peu de chance qu’elles perdurent dans le temps comme elles sont ancrées dans l’actualité. Dommage car il y a du beau matériel ici, à écouter comme il faut à quelques reprises pour pleinement apprécier!
À écouter : Hostie de bonne smoke, Charlie Hebdo, L’ayatollah Couillard
7,9/10
Par Olivier Dénommée
Critique de salon 