Neuraxis est considéré comme le groupe métal le plus influent des 20 dernières années selon le Terrorizer Magazine. Étant à la base un groupe de punk hardcore, leur son, lors de leurs premiers albums, a évolué vers ce qui deviendra leur style révolutionnaire : le post-métal.
Petit aparté avant de commencer la critique : le post-métal, par définition, cherche à faire exploser le style classique de composition musicale (intro, premier couplet, refrain, 2e couplet, pont, etc.). La construction d’une chanson post-métal aura souvent tendance à commencer doucement pour atteindre un ou plusieurs points culminants vers la fin de la chanson. Il s’agit en fait de composer une chanson hors du commun, très ambiante, avant-gardiste (à ne pas confondre cependant avec le avant-garde metal, qui est un tout autre sous-genre).
Enemy of the Sun, sorti en 1993, est précurseur de ce genre, car il y incorpore toutes les caractéristiques mentionnées plus haut. Il faut avoir une oreille musicale assez fine pour arriver à apprécier cette musique, car les compositions de Neurosis ne sont pas faites pour passer à la radio. Lost, qui ouvre l’album avec une bombe (dans le sens de «cette chanson est excellente»), dure presque dix minutes et Cleanse, qui le ferme, dure plus d’un quart d’heure.
Les ambiances constituent la plus belle réussite de cet opus. Rares sont les compositions qui immergent à ce point l’auditeur dans un univers à la fois chaotique et poétique avec une touche de psychédélique au passage. Une atmosphère très sombre inspirée du doom metal se colle très bien aux guitares lourdes et aux rythmes parfois atypiques de la batterie.
Moi qui n’aimais pas la voix du chanteur, ici je n’ai pas tant à me plaindre, car elle prend très peu d’espace par rapport à la musique et, lorsqu’elle en prend plus, se fond à l’ambiance sans la ruiner, un exploit pour ce type de chant assez unidimensionnel.
Ici, le principal problème est qu’à vouloir expérimenter une structure différente, on se retrouve avec plusieurs chansons suivant plus ou moins la même structure. Début plus calme, puis augmentation de la brutalité, parfois de la vitesse, mais surtout du bruit pur, pour arriver à la fin qui constitue l’apogée. Cependant, une exception notable : Lexicon, qui débute en quelque sorte avec la fin de la pièce précédente, Cold Ascending, puis évolue vers une chanson différente sans jamais totalement se séparer de son matériau de base. Cleanse clôt l’album sur une très bonne note avec une section rythmique très punchée et une ambiance de jungle quasi-effrayante qui te fait penser à un de ces films où des touristes sont victimes de cannibales et attendent d’être sacrifiés.
Bref, un album très spécial que j’ai beaucoup apprécié à ma grande surprise. Un album qui sonne différent de ce qu’on a l’habitude d’entendre et qui fait du bien.
À écouter: Lost, Lexicon, Cleanse
8/10
Par Sacha Dürig