Véritablement découvert avec son premier album solo en 2010, l’auteur-compositeur-interprète sénégalais d’origine mais montréalais d’adoption Élage Diouf est pourtant dans notre paysage musical depuis un moment. On se souviendra notamment de ses passages en langue wolof dans certaines chansons des Colocs, groupe auquel il a participé avec son frère Karim. L’artiste poursuit ici sa lancée en solo avec Melokáane, voulant dire «reflet» dans sa langue maternelle, où il s’amuse à travers les styles.
L’opus de 12 titres se résumerait bien difficilement. Beaucoup de musique du monde (dont du reggae), bien sûr, mais aussi des petits accents de musique électronique, du rock, du blues… Vocalement, c’est majoritairement en wolof, mais on y retrouvera aussi de l’anglais et du français. Bref, le genre d’album pour lequel le mot «éclectique» semble tout désigné.
C’est Mandela qui inaugure l’opus. On y mélange une musique énergique à des citations de Nelson Mandela, offrant certes un message engagé, mais surtout un message chargé d’espoir. Somme toute, une bonne entrée en matière, bien que la suite sera plus marquante. Notamment, le blues énergique de Tay, une surprenante version de Secret World (Peter Gabriel) en wolof, une chanson en duo avec Johnny Reid (la ballade Just One Day), Probleme Yi, la chanson engagée Sankara, et la finale Dekoulo Fi, au rythme entraînant sans être aussi «rentre-dedans» que d’autres titres de l’opus.
Une des faiblesses des chansons plus énergiques de l’album, c’est probablement leur côté surproduit : beaucoup d’effets, beaucoup de voix ajoutées, voire parfois empilés. Cela rend difficile de savoir sur quoi se concentrer. Foula ak Fayda en est un bon exemple. Par contre, dès qu’on fait abstraction de cette surcharge, on peut les apprécier pour leur côté festif, chaud et dansant, ce à quoi aspirait vraisemblablement l’artiste en les jouant. Les chansons plus douces, en revanches, se veulent plus épurées, et généralement plus faciles à bien cerner.
Bien qu’Élage Diouf a élu domicile au Québec il y a près de 20 ans, on sent encore sa fierté pour sa patrie, le Sénégal, et pour l’Afrique en général. Les chansons Mandela et Sankara (en l’honneur de deux grands noms qui ont lutté contre l’apartheid) en sont des témoignages.
On connaissait déjà Élage Diouf pour la variété de ses influences, et c’était une fois de plus prouvé ici. Là où on commence à s’y perdre, c’est dans les extrêmes vers lesquels il amène l’auditeur. L’artiste offre à la fois un opus ensoleillé et dansant et une œuvre engagée qui veut inciter à conscientiser. Bien que le résultat soit plutôt réussi, cela fait beaucoup pour un seul album!
À écouter : Just One Day, Misal, Dekoulo Fi
7,7/10
Par Olivier Dénommée