Sorti le 24 mars 2017
Issue du monde de la comédie musicale, Geneviève Leclerc s’est forgé une solide réputation au cours des ses années à l’international. Enfin connue par son Québec natal depuis sa participation à la 4e édition de La Voix en 2016, elle lance son premier album Portfolio dans lequel elle se permet un tour d’horizon complet de son univers musical où chaque morceau est en quelque sorte une mini pièce de théâtre.
Le réalisateur du long jeu, Toby Gendron, s’est tout d’abord assuré que jamais l’interprète n’ait à «crier». Ce détail est remarquable tout au long du disque, qui laisse pourtant entendre une voix puissante au timbre coloré, très agréable à écouter. Déjà dans la première piste, Calling You, on sent un contrôle exceptionnel de l’instrument avec lequel la chanteuse s’amuse sans trop de problème. La chanson est superbe; on aurait par contre pris plus de legato au refrain. Juste après, elle nous offre un Parlez-moi de lui sensible dans une instrumentation très simple qui n’éclipse jamais la voix. Elle poursuit avec une atmosphère soft jazz dans Ces petits riens où seuls la contrebasse et l’accordéon lui donnent la réplique. Après seulement trois morceaux, on peut dire que l’artiste a le chic pour doser et varier les différents styles efficacement.
On compte trois chansons originales parmi cet opus de reprises. La première entendue est Limpide, clairement la plus vibrante des trois. Magnifique composition d’Amélie Larocque, on nous laisse découvrir une interprète fragile mais solide à la fois dans un texte sublime. Tout juste après, il y a Mon indispensable signée Frédérick Baron et Vincenzo Thomas qui fait monter la barre d’un cran au niveau de l’intensité. Si les larmes n’avaient pas encore coulé, cette pièce vous achèvera sans nul doute avec son crescendo nuancé qui vous arrache le cœur.
Heureusement, la force de cet album est l’équilibre entre les différentes chansons, ce qui nous mène à un surprenant What’s up, populaire chanson de 4 Non Blondes. On revisite ici ce classique dans une version lente toute en douceur qui fonctionne vraiment bien avec le texte, lui donnant une nouvelle profondeur. Elle est suivie de la dernière chanson inédite du projet, J’aimerais pouvoir te dire, offerte par Marc-André Sauvageau. Très jolie, on y introduit une ambiance «chanson française» qui plait et apaise l’oreille. Tu es mon autre suit juste après. Chantée en duo avec Éric Lapointe, la pièce reste plus relâchée au niveau de l’esthétique ce qui en fait un élément faible (le seul) de l’opus.
On passe maintenant à la pièce maîtresse de l’œuvre de Serge Lama, Je suis malade. On en connaît surtout la reprise de Lara Fabian et c’est clairement ce qui a d’abord inspiré cette version plus épurée et définitivement moins show off. Même si on sent encore un peu trop de Fabian dans les altérations mélodiques, on y entend une humanité à laquelle il est difficile de rester insensible. Geneviève Leclerc livre un Je suis malade majestueux, rien de moins.
Elle offre une performance comparable dans Les parapluies de Cherbourg, tiré de la fameuse comédie musicale du même nom, composée par Michel Legrand. On garde ici la chanson telle quelle en changeant à peine quelques passages de la mélodie, ce qui rend cette reprise très agréable à l’écoute puisque l’on ne se perd pas dans des ajouts superflus qui gâcheraient la beauté de la musique. Certes, il aurait été judicieux d’enlever quelques rubato qui peuvent parfois être agaçants. Pour terminer, Leclerc se gâte en reprenant Love Will Keep Us Together de Captain and Tenille en une version acoustique qui jette par terre. En toute franchise, cette reprise a de quoi surpasser l’originale.
Geneviève Leclerc se dédie à sa musique bien humblement et c’est une force que peu d’interprètes peuvent se vanter de posséder. Portfolio rassemble 11 titres aussi excellents les uns que les autres, s’enchaînant parfaitement pour créer un disque accrocheur qui plaira à tous, sans exception.
À écouter : Limpide, What’s up, Love Will Keep Us Together
8,5/10
Par Audrey-Anne Asselin