Sorti le 20 octobre 2017
Le projet montréalais Esmerine combine les forces de certains artistes à surveiller. Mentionnons seulement Bruce Cawdron (de Godspeed You! Black Emperor) et Rebecca «Becky» Foon (de Thee Silver Mt. Zion) pour nous donner une idée du talent qui se cache derrière ce groupe fondé dans la première moitié des années 2000. L’album Mechanics of Dominion est décrit par le groupe comme étant son album le plus dynamique et le plus narratif, mêlant «le néo-classique, le minimalisme, le contemporain, le folk, le baroque, le jazz et le rock». L’écoute de cet opus riche tend à donner raison à ces prétentions.
Le côté minimaliste se fait immédiatement entendre dans The Space in Between, offrant une simple intro au piano. D’autres instruments arrivent très discrètement au fur du morceau, et le piano finira pas s’agiter davantage mais l’ensemble garde une teinte classique relativement minimaliste (ce qui n’est pas sans rappeler Ludovico Einaudi) qui ne déplaît pas. La Lucha Es Una Sola, quant à elle, offre des sonorités plus contemporaines et plus tendues. Rien d’exceptionnel dans la première moitié (sur 8 minutes), mais la seconde nous explose aux oreilles avec une intensité qu’on n’a pas vu venir. Dommage que la pièce n’ait pas cette force tout le long, quitte à la faire plus courte.
Il y a quelque chose d’intriguant, mais aussi d’entraînant dans La Penombre, juste après, avec le marimba qui vole la vedette, pour le plaisir de nos oreilles. L’intrigue se poursuit avec La plume des armes, aux sonorités plus enfantines… au début, du moins. La piste s’obscurcit rapidement, après moins de 2 minutes, mais tente de se ressaisir en quelque chose de presque épique après 4 minutes. Intéressant, mais cela reste une des pistes plus inégales de l’album.
La douceur du piano (et du violoncelle) revient à Que Se Vayan Todos, mais pour une durée limitée : l’intensité explose en plein milieu du morceau avec la batterie et plusieurs bruits de drones en avant-plan. On garde une énergie similaire pour le début de la pièce-titre Mechanics of Dominion, qui, au contraire, diminuera son tempo et son volume de décibels, sans mettre de côté son intensité épique et juste assez mystérieux. On se surprend à taper du pied sur celle-ci, alors que la musique semble s’apparenter à celle d’un cirque sur l’acide. C’est étrange, mais ça fonctionne!
Northeast Kingdom nous ramène, une fois de plus, vers un tandem piano/violoncelle doux et, contrairement aux autres, ne change pas complètement de mood en milieu de pièce! Ici, on profite de 7 minutes de beauté et d’intensité entre les deux instruments et c’est tout ce qu’il nous faut! On surenchérit en terminant l’album avec Priscibus Maris, brève finale dans le même registre.
Beaucoup d’ambiances s’entrechoquent dans Mechanics of Dominion, c’est le moins qu’on puisse dire! Au cœur de l’album semble se cacher cette dualité entre la douceur et la vigueur, mais le tout est somme toute assez bien équilibré. Évidemment, il y a certains moods où l’album s’écoute mieux. Quelque chose nous dit que les froides soirées d’automne seront de bons moments pour l’apprécier. Bref, on a droit à un vraiment bon album qui confirme plus que jamais la pertinence de Esmerine dans notre paysage.
L’album est disponible pour écoute sur Bandcamp.
À écouter : La Penombre, Mechanics of Dominion, Northeast Kingdom
8,2/10
Par Olivier Dénommée