Sorti le 21 septembre 2018
Christine and the Queens a eu droit à un torrent d’éloges dès son premier album, Chaleur humaine, mais ça n’avait rien à voir avec le succès critique qu’a suscité sa seconde offrande, Chris, où elle tente d’écourter son nom de scène pour l’occasion (pour info, ça n’a pas très bien fonctionné parce que tout le monde continue à utiliser Christine and the Queens pour parler d’Héloïse Letissier). Comme plusieurs médias ont inclus cette sortie parmi leurs tops de 2018, nous avons préféré en avoir le cœur net afin de voir ce qui avait bien failli passer sous notre radar.
Chris a la particularité d’offrir deux facettes à son album. La première est essentiellement en français et la seconde, une version anglophone des mêmes chansons (sauf quelques exceptions que nous noterons). Le côté électro-pop de l’artiste est très présent, mais on sent beaucoup d’influences nous ramenant aux années 90, voire 80. Et il y a même eu des accusations de plagiat dans le cas de Damn, dis-moi / Girlfriend, où elle reprend des loops issues du logiciel Logic Pro. Bon, il ne s’agit certainement pas d’un plagiat en soi, mais peut-être un signe d’un certain manque d’originalité, surtout que c’est pour le tout premier single de l’album, donc normalement une pièce-phare.
L’écoute de la face francophone de l’album démarre avec Comme si on s’aimait. Un morceau pop à souhait et très catchy, mais rien d’inédit ici. Le même genre de commentaire peut être fait pour la plupart des chansons suivantes, que ce soit Damn, dis-moi (avec la collaboration de Dâm-Funk), La marcheuse ou Doesn’t Matter (Voleur de soleil). Rien n’est particulièrement mauvais, mais rien ne se démarque complètement non plus par rapport à ce qui se fait ailleurs.
C’est à partir de 5 dols que ça se gâte un peu, où la chanteuse commence à abuser des répétitions de paroles pas claires. «5 dols, baby blues, 5 dols, baby», ça ne fait pas un refrain fort. Elle réussit à faire encore pire avec Goya! Soda!, particulièrement pénible à écouter. Follarse est loin d’être aussi désagréable, mais la répétitivité de son refrain aurait pu être évitée, selon nous.
Chris se ressaisit ensuite avec Machin-chose, où elle excelle particulièrement dans son côté émotif. S’ensuivent deux pistes qui ne se retrouvent pas dans la facette anglophone de l’album : Bruce est dans le brouillard et Le G. Rien de particulier à mentionner sur ces chansons qui contiennent de bonnes idées, mais qui n’arrive toujours pas à complètement se démarquer. Toutefois, mentionnons l’efficacité de Les yeux mouillés, de retour à la douceur pour l’occasion. L’étranger (voleur d’eau), en revanche, est à oublier à la toute fin de cette première moitié.
Maintenant, la facette anglophone de l’album! Comme mentionné, la plupart des chansons sont identiques des deux côtés, si ce n’est qu’elles offrent des textes en anglais à la place. Étrangement et bien que la chanteuse soit française, elle semble dans bien des cas mieux se défendre en anglais. Ou bien, ses textes souvent incompréhensibles passent mieux dans cette langue. En tout cas, ça a un effet bénéfique pour bien des chansons, dont Comme si, The Walker et Doesn’t Matter. C’est aussi très réussi dans le cas de What’s-her-face et de Make Some Sense. La version anglo a aussi droit à sa chanson exclusive : Feel So Good. Mais il n’y a pas grand-chose de plus à en dire, si ce n’est qu’elle ne se démarque pas particulièrement plus du lot.
Ceux qui se sont plongés dans l’analyse des paroles de l’album y ont vu un opus fort défendant la communauté LGBT. Mais dans le cas d’un album pop, les paroles sont souvent bien secondaires, et ça dilue grandement leur effet. On a décidé de ne pas se concentrer sur cette facette précise pour la simple raison que ça ne saute pas aux oreilles à moins qu’on veuille vraiment écouter ce qu’elle a à dire.
C’est peut-être pour cette raison que, pour nos oreilles du moins, l’album Chris n’a absolument rien de révolutionnaire, au contraire, et qu’il s’ajoute tout simplement à la liste déjà très longue d’albums pop qui connaissent un succès retentissant sans qu’on comprenne exactement ce qui justifie ce succès. Nul besoin de dire que Chris ne figurera pas dans notre top 2018.
À écouter : Franco : Machin-chose, Les yeux mouillés // Anglo : Comme si, Doesn’t Matter
6,9/10
Par Olivier Dénommée