Sorti le 26 avril 2019
L’auteure-compositrice-interprète Andréanne «Andy» St-Louis se fait connaître depuis quelques années avec une chanson pop aux tendances humoristiques. Une chanson sur la recherche d’appartement à Montréal parue ces derniers mois donne une très bonne idée de son registre. Après un long parcours où elle n’a pas brûlé d’étapes (sans vouloir être prétentieux, je connais l’artiste depuis 2009 ou 2010 où elle commençait déjà à préciser sa direction), la voilà qui lance Chroniques d’un petit bout de femme, son tout premier album.
Le style d’Andy St-Louis est décrit comme de la «pop-cabaret-sympathique». Concrètement, on a droit à des pièces au thème ou au traitement qui font sourire, surtout en début d’opus. Après un Prélude au piano qui nous rappelle que la chanteuse est avant tout une excellente musicienne, elle nous surprend avec Maudite inspiration, présentée comme chanson sur une relation amour-haine toxique. St-Louis reprend à la perfection les codes (pour ne pas dire les clichés) de la chanson pop, mais le fait avec bon goût. On a bien l’impression que quiconque ayant un côté artistique pourra se retrouver dans cette chanson.
L’humour est tout aussi présent dans T’aurais pas dû, où elle croit naïvement que d’avoir une auto à Montréal est une bonne idée, et dans Boîte vocale, le monologue d’une ex en fera rire jaune quelques-uns. Dans ces deux cas, la mélodie et la musique sont plus secondaires et ne font qu’appuyer le récit que la chanteuse nous propose.
En première portion de l’album, Monsieur l’commis surprend avec une forme rappelant les chansons à répondre trad avec l’accent mis sur l’efficace refrain qu’on entend tout de même à 7 ou 8 répétitions en 3 minutes et demi. Notre bémol serait que la dernière fois était de trop alors qu’elle tente une énergie qui ne correspond plus vraiment à ce qu’elle créait jusqu’ici.
Puis, après que la plupart des morceaux plus comiques et légers soient passés, Andy St-Louis se met en mode sérieux. La magnifique et mélodieuse Tu me reviendras en est un parfait exemple où on sent que la chanteuse a laissé tomber le filtre humoristique pour livrer quelque chose de plus sincère. Ça lui va bien, mais on avoue que dans la progression de l’album, on ne sait pas trop comment le prendre. Elle propose aussi l’intelligente Derrière ta photo, qui critique assez ouvertement les effets néfastes qu’ont les réseaux sociaux (Facebook et Twitter en tête) sur nos relations interpersonnelles qui se retrouvent altérées.
Tout ça, ça se trouve en première moitié de l’album. S’ensuit un Interlude (au piano encore), qui nous amène à la portion «sérieuse pour vrai» de l’exercice, où l’artiste se démarque moins comme parolière comique, mais davantage comme une compositrice de belles chansons émotives. Quelque chose à dire, Valse pour deux et La lettre font notamment partie de ces chansons qui nous confirment qu’Andy St-Louis ne fait pas que dans l’humour et l’anecdote et qu’elle se défend aussi bien dans ce registre.
Par contre, on avoue qu’on a haussé un sourcil en entendant Ma plume s’endort la première fois. Si Andy St-Louis a montré qu’elle pouvait reprendre des clichés de la pop pour créer quelque chose de très comique, on ne pense pas que le résultat soit aussi réussi quand elle utilise ces clichés musicaux sérieusement. La musique de Ma plume s’endort est festive et radiophonique, mais ça détonne tellement du reste de l’album (pourtant assez varié musicalement) qu’on sent qu’elle n’a pas tout à fait sa place ici. Cela fait partie des risques d’offrir un album de 15 pistes : parfois, certaines chansons n’arrivent pas à aussi bien justifier leur place. Mais heureusement, en général, on comprend la direction qu’a choisi de prendre l’artiste avec Chroniques d’un petit bout de femme, avec deux moitiés relativement définies.
Andy St-Louis est de ces artistes qui séduisent avant tout par leur énergie contagieuse et pour leur prestance sur scène. On sent que ce premier album, même s’il représente assez bien on vaste éventail musical, ne la met pas encore assez en valeur et aura peut-être de la difficulté à convaincre ceux qui ne la connaissent pas déjà. D’autant plus qu’il faut être dans un état d’esprit très particulier pour apprécier autant son côté nature et son côté givré aux saveurs bien différentes.
À écouter : Monsieur l’commis, Tu me reviendras, La lettre
6,8/10
Par Olivier Dénommée