Sorti le 30 août 2019
Le précédent album de Tool, 10,000 Days, avait vu le jour en 2006, plusieurs années avant la naissance de ce modeste blogue. Tout de même, on a fini par écouter et critiquer chacun des albums de la formation américaine, se demandant quand un cinquième album suivrait. Puis vint Fear Inoculum, que tous attendaient avec impatience après 13 ans, et pour lequel les attentes étaient dans le tapis. Autant dire tout de suite que critiquer du nouveau Tool en 2019 ne serait pas une mince affaire.
Mon oreille me disait qu’à chaque album, Tool arrivait à se réinventer et à aller plus loin. C’est pourquoi 10,000 Days était à mon sens le plus abouti jusqu’à ce jour. Et après une telle attente, il était normal d’espérer une grosse surprise venant de Fear Inoculum. La réponse brève : non, on reste somme toute en terrain connu avec ce cinquième opus.
D’abord, reconnaissons l’innovation de cet album : Tool mise ici sur une série de longues chansons. Les pistes «principales» font toutes plus de 10 minutes. En tout, avec les interludes (qui étaient loin d’être obligatoires à notre avis), on atteint une durée de 86 minutes pour la version numérique, chose qui semblait impensable à l’époque pré-Spotify. Mais à part ça, la signature de Tool est reconnaissable immédiatement.
Dès les premiers instants de la chanson-titre Fear Inoculum, les premières lignes (apparemment de cordes, mais vraisemblablement jouées au synthé) trahissent déjà le son particulier du groupe, même s’il a ajouté une touche orientale dans l’instrumentation. En cas de toute, l’arrivée du chanteur Maynard James Keenan confirme à qui on a affaire. Ce dernier ne prend d’ailleurs jamais complètement le dessus : la voix fait partie des instruments et contribue comme les autres au long build-up de 10 minutes. Évidemment, qui dit «toune de 10 minutes» dit «plusieurs changements d’énergie». Plusieurs passages sont réussis, surtout dans les deux dernières minutes.
La suivante, Pneuma, va davantage droit au but (malgré ses presque 12 minutes). On y reconnaît des riffs nous ramenant à l’ère Lateralus, ce qui est franchement loin d’être désagréable. Quant à la voix, elle se fait relativement discrète, mais les mélodies qu’elle livre sont parmi les plus mémorables de l’opus. Plus loin, c’est au tour d’Invincible de se faire entendre, avec une polyrythmie parfois déroutante. À l’approche de la seconde moitié de la piste, on a aussi droit à des passages plus intenses de la part du groupe. Le bémol repose surtout dans l’utilisation peu convaincante d’effets dans la voix du chanteur à certains moments et dans l’impression que la chanson dure juste un peu trop longtemps pour rester efficace à 100%.
Au contraire, le dosage est somme toute très bon dans Descending, livrant plusieurs des meilleures lignes d’Adam Jones (guitare) de tout l’album. Et Culling Voices, sans être notre favorite du lot, crée une ambiance comme seul Tool sait le faire. La dernière (longue) chanson de l’album est 7empest, où chaque musicien met le paquet pour finir en force. On parle ici d’un morceau de près de 16 minutes, et pourtant, on peine à trouver des longueurs… c’est généralement bon signe!
Parlons maintenant des interludes, les principales faiblesses de l’album. On a droit à Litanie contre la peur, une insignifiante expérimentation aux synthés, Legion Inoculent, morceau lugubre où on n’entend pas grand-chose d’autres que quelques références à d’autres pistes de l’album (par exemple, on reconnaît clairement une ligne de Fear Inoculum), Chocolate Chip Trip, long interlude de près de 5 minutes qu’on finit systématiquement par passer, et Mockingbeat, la dernière piste de tout l’album où on imite des bruits d’oiseaux électroniques… toute une fin dont on se serait bien passée! Si certains vouent un culte aux interludes de Tool, ce n’est vraiment pas notre cas et on ne peut que conseiller de les sauter lorsque possible pour pouvoir pleinement apprécier ce que l’album a de mieux à offrir à la place.
Quand on prend le temps d’écouter l’album et de l’apprivoiser, Fear Inoculum passe haut la main le test. Il nous surprend certainement moins que qu’on pouvait espérer, mais il s’intègre parfaitement au reste de la discographie et consolide le son qui a fait sa renommée. Sans être le meilleur que Tool a fait, ça reste aisément un des albums les plus réussis de 2019.
À écouter : Pneuma, Descending, 7empest
7,8/10
Par Olivier Dénommée