Home Inspiration – Rachel Therrien

coverSorti le 7 octobre 2014

Trois ans et de nombreuses expériences après son On Track, la trompettiste montréalaise Rachel Therrien offre son second opus en formation quintette (trompette, sax, piano, basse et batterie), intitulé Home Inspiration. Après avoir autant voyagé, il est intéressant d’entendre ce qu’inspire Montréal à l’artiste dans ses compositions.

Déjà, dans son premier album, sa musique ne manquait pas de rythme, au contraire. Mais ici, on sent que Rachel Therrien et son band ont acquis en assurance, et ils osent beaucoup, dans cet album à saveur tantôt urbaine et tantôt world.

On ne veut pas nous brusquer tout de suite avec To John : intro tout en douceur (on est accueillis par des handclaps rythmés pendant quelques secondes, avant que les autres instruments s’ajoutent), jusqu’à ce qu’on entende enfin la trompette. Le drum, très actif et changeant, apporte un élément plus corsé à la musique et ajoute une petite tension de plus pendant les solos. Les solos occuperont d’ailleurs une partie important de cette pièce, mais aussi de la plupart des pistes de Home Inspiration, dans la plus grande tradition jazz. À la fin, on revient comme au début, faisant disparaître un instrument après l’autre, jusqu’à ce qu’on finisse avec les mains.

Après cet accueil somme toute léger, passons aux choses sérieuses : Ploma nous explose dans les oreilles avec des grooves latines mélangées à des différentes influences plus urbaines. Chapeau au travail du batteur Alain Bourgeois qui réussit à voler la vedette plus d’une fois par la force de ses rythmiques. Les solos sont aussi très impressionnants, mais encore plus vers les trois quarts, lorsque ça dégénère : cela prendra plusieurs bonnes écoutes pour tout entendre ce qui se dégage de ce segment riche en notes!

Avec Lost, on tombe dans l’expérimentation. Après deux minutes déjà assez discordantes, le titre prend tout son sens avec des notes qui semblent jouées au hasard par tout le monde. On a même droit à des sons droits sortis d’un film de science fiction. Est-ce le sentiment de Rachel Therrien lorsqu’elle se perd à Montréal? On s’adoucit ensuite avec Thelxinoe, où on passe à un doux duo piano-trompette qui nous berce les oreilles.

Whatever contient quelques éléments très intéressants, dont la progression harmonique et peut-être des bouts de mélodie qui rappellent certains standards de jazz (certains bouts m’ont un peu fait penser à Giant Steps de Coltrane). Chose certaine, il y a des éléments accrocheurs cachés dans cette piste. Paradis, juste après, nous fait voyager entre différentes énergies. Si le début est un peu lent, on passera peu après à un passage plus corsé, avant de tomber dans quelque chose de plus «loungy», puis space avec des envolées de synthés… Tout ça, avant d’arriver au milieu de la composition! Ça vous donne une idée. Néanmoins, même si on n’a que peu de temps pour savourer chaque portion, les transitions se font bien et on ne décroche pas à chacun des changements.

Last Inspiration est intéressante, parce que les vents semblent aller dans une direction et la section rythmique, dans la direction opposée. Cela fait un tout petit clash entre la mélodie jazz et les rythmes plus urbains, notamment de la batterie. La Soledad semble revenir à la douceur de Thelxinoe, mais l’agressif solo de sax nous rappelle à l’ordre! Vient ensuite Parallèle, un Paradis mais plus intense encore. Et c’est techniquement sur Out of a Dream qu’on conclut cet opus. Une pièce légère et énergique pour finir l’album Home Inspiration avec du pep.

Par contre, en bonus, Rachel Therrien ajoute deux prises alternatives des compos de l’album : Lost et Parallèle. Cela amène la durée totale à 68 minutes! Même si personne ne peut se plaindre d’avoir plus de musique pour le même prix, ces pistes n’étaient pas nécessaires et donneront l’impression que l’expérimentation occupe trop de place.

Il m’aura fallu plusieurs bonnes écoutes pour bien apprivoiser cet album riche en émotions et en énergies diverses. Si tout n’est pas toujours facile d’écoute du premier coup, pratiquement tout a un petit quelque chose d’accrocheur qui incitera à tendre un peu plus l’oreille la prochaine fois. La section rythmique a fait un travail remarquable pour donner vie aux compositions du quintette de Rachel Therrien et leur donner leur saveur si particulière. Notez que les pièces les plus marquantes se retrouvent presque toutes en première moitié d’opus.

À écouter : Ploma, Thelxinoe, Paradis

7,9/10

Par Olivier Dénommée

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