Sorti le 9 juin 2017
Féministe, poète et activiste à ses heures, Ani DiFranco s’est fondé une solide réputation en tant qu’auteure-compositrice-interprète mais aussi en tant que guitariste invétérée. L’influence qu’elle apporte au courant anti-folk est toujours aussi présent dans ce nouvel album, Binary, pour lequel il est impossible d’étiqueter un genre précis. Un mélange hétéroclite surprenant, encore une fois.
Le tout commence en force avec Binary, chanson-titre de l’opus qui nous plonge dans des sonorités uniques aux claviers et aux percussions. La voix d’Ani DiFranco n’a rien de spécial en soi : on vise surtout la force des textes et, au final, sa façon de livrer celui-ci est ce qui nous importe le plus. Pacifist’s Lament amène un changement de cap complet juste après. Nous qui arrivions d’une ambiance plutôt déjantée, on se retrouve rapidement dans une ballade purement folk (ironiquement) qui plaît immanquablement. On retrouvera d’ailleurs cette même vibe uniquement en clôture d’album avec Deferred Gratification, qui surpasse de loin celle entendue plus tôt au niveau de l’émotion qu’elle engendre.
Revenons cependant sur nos pas pour parler de Play God, un genre de reggae non seulement accrocheur, mais aussi arrangé de façon ingénieuse. Les différentes textures instrumentales intégrées au morceau donnent manifestement une couleur unique à la musique de DiFranco qui, encore une fois, se surpasse. Telepathic et Even More apporteront aussi leurs propres idées, sans toutefois surpasser ce qui a été entendu quelques pistes plus tôt. Spider nous surprend juste après et on ne sait trop comment se sentir face au refrain drôlement ficelé. On peut facilement s’imaginer que ça peut devenir agaçant à la longue, même si pour l’instant il ne fait que nourrir notre côté punk refoulé.
Alrighty nous avait laissé de glace en début d’album, Sasquatch est toutefois indéniablement la chanson intruse du long jeu. Difficile de dire ce qui déplaît à ce point; est-ce le répétition du titre à plusieurs reprises ou simplement la mélodie qui est, justement, anti-mélodique? On finit par en convenir que la pièce est juste profondément dérangeante. Terrifying Sight qui suit juste après ne restera pas l’une des favorites, mais on ne peut pas dire qu’elle agresse l’oreille au point où on aurait envie de la sauter à chaque fois que l’on y est rendu dans l’enchaînement.
Ani DiFranco est l’une de ces musiciennes à qui l’on doit s’ajuster. Lorsqu’on se lance dans une écoute comme celle-ci, il faut vraiment partir avec l’idée que l’on entendra que très peu de mélodies conventionnelle, et il faudra être très attentif pour apprécier les beautés subtiles de ses compositions qui peuvent parfois nous sembler extra-terrestres. Malgré un ou deux ratés, ce nouvel opus peut facilement s’inscrire dans sa liste de «réussites».
À écouter : Binary, Play God, Spider
7,5/10
Par Audrey-Anne Asselin