L’émission Bol de gruau, à CISM, est animée par Michael Gagné, et a un mandat clair : «Une atmosphère pure, un son vrai, des artistes tapageurs qui font de la musique remplie de cordes, de nostalgie, de violon, de banjo et d’harmonica, de bretelles et de bottes de cuir!» Bref, une vitrine radiophonique pour les artistes du registre folk, blues et country.
Cette émission a donné naissance à la Compilation Vol. 1 de l’émission, mettant de l’avant 14 performances live par 11 artistes, souvent avec un cru qui rappelle la compil Donne la patte. C’est aussi l’occasion pour des artistes plus ou moins connus de se faire entendre sur les ondes et au-delà; quelques belles découvertes ont pu être faites à travers la compilation.
Seb Black et sa voix à la Tom Waits initient la compilation avec force avec Dead Man’s Hand. Plus léger (et grossier), on s’initie à deux titres de Blendeur Blues, le «cowboy-homme-orchestre» qui crie et joue avec l’intensité d’un Bernard Adamus. Si j’lâche, malgré sa simplicité évidente, demeure un titre très efficace en ce début de compilation. Et puis le personnage à lui-seul mérite déjà une écoute.
On a aussi droit à un rappel du style de Jonathan Painchaud en la personne de Phil Moreau, et à la musique rêveuse de Mathieu Bérubé. D’ailleurs, Bérubé est un des rares artistes que je connaissais avant d’entendre cette compilation. Plus habitué à ses versions plus chargées où les synthétiseurs occupent beaucoup plus d’espace, je lui ai ici découvert un côté plus minimaliste qui lui va plutôt bien.
Les objets perdus de Coroner Paradis marquera pour l’intensité de son refrain, qu’il criera à la fin. Malgré cette finesse moins évidente, cette vigueur fait en fait le charme de la chanson. Cela peut quand même prendre quelques écoutes à apprécier celle-ci. Un autre qui peut laisser perplexe aux premières écoutes : Mon Doux Saigneur, qui a deux chansons au menu. Si Personne ne le sait pas n’arrive pas à convaincre tout de suite, Helena offre un peu plus de subtilité.
Dans le registre des chansons tout en douceur à écouter, il y a Two Brothers de Daniel Isaiah. Version parfaite qui fait oublier que c’est enregistré live. Au contraire, des pistes comme Les boulets aux pieds (par Dylan Perron) et Dans le sens contraire (par Sara Dufour) mettent de l’avant le côté live énergique où on joue vite avec avec intensité.
En fin d’opus, on donne le dernier mot à Bolduc Tout Croche, avec sa voix parfaite pour le country. Mon vieux village, une pièce empreinte de nostalgie, aurait parfaitement conclu l’album, malgré sa voix qui craque un peu. On a plutôt fini avec la valse bluesy La toune du chômeur.
Malgré le contenu très intéressant qu’on découvre ici, certaines performances semblent avoir été plus fades. Dans tes robes de Rose Vagabond n’a pas évoqué la même chaleur que la plupart des autres pistes de l’opus.
Bol de gruau a permis de non seulement promouvoir plusieurs artistes talentueux qui avaient grand besoin de plus de visibilité, mais aussi de les mettre à l’épreuve en live et en version acoustique. L’exercice a permis de mettre de l’avant les qualités compositionnelles de tous ces artistes, sans l’enrobage que des arrangements trop touffus peuvent créer. Compilation Vol. 1 nous offre de la musique pure, sans filtre, sans la «magie» du studio. Des artistes, avec leur guitare, leur micro et leur tambourine, qui nous rappellent que la musique vient avant tout des tripes. Pour ces raisons, on peut dire que l’exercice est une réussite.
Compilation Vol. 1 de Bol de gruau est disponible sur Bandcamp.
À écouter : Dead Man’s Hand, Les objets perdus, Two Brothers
7,6/10
Par Olivier Dénommée